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CRIMES HAINEUX AU QUÉBEC : IL FAUT DES ACTIONS FERMES ET EFFICACES



Montréal, 25 septembre 2019 — Le CRARR note l’urgence d’agir face à la situation des actes et des crimes haineux au Québec, dont la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse a fait état dans un rapport de recherche rendu public aujourd’hui.

Le CRARR félicite la Commission d’avoir réalisé cette recherche qui affirme la nécessité de la part des autorités d’agir avec des mesures concrètes d’information et de soutien aux victimes, de formation des policiers et de lutte contre la haine sur Internet, incluant les médias sociaux. L’augmentation des actes haineux au Québec (une hausse plus élevée au Québec entre 2015 et 2017 que dans le reste du Canada) est désormais indéniable, notamment ceux de nature anti-noire, anti-arabe, antisémite, islamophobe et xénophobe.

Ces actes haineux que la Commission considère comme « une forme grave de discrimination qui mettent à mal l’égalité et le sentiment de bien-être au sein de la société », minent les valeurs fondamentales de diversité, d’égalité et de liberté et menacent la sécurité publique ainsi que la cohésion sociale au Québec.

La Commission fait état dans son rapport de plusieurs situations déjà connues, dont le fait que peu de victimes portent plainte auprès de la police. Les obstacles systémiques au niveau de l’accès à la justice pour les victimes d’actes haineux, notamment les femmes noires, arabes et immigrantes et leurs enfants, doivent être identifiés et éliminés.

Dans cette optique, le CRARR souhaite que les recommandations de la Commission au Gouvernement fassent rapidement l’objet de suivi par les ministères et organismes concernés.

Cependant, le CRARR demeure perplexe face à l’omission de mention des rôles et des responsabilités du ministère de la Justice et de la Couronne au sujet de la poursuite judiciaire des auteurs de crimes haineux. Ces organismes ont eux aussi leur part à jouer dans ce dossier.

Le CRARR note aussi le fait que la Commission se limite à un rôle d'éducation, de conseil et de coopération dans la mise en œuvre des mesures contre les actes haineux, mais qu’elle demeure silencieuse quant à son mandat d'enquête sur les plaintes et d’assurer une protection effective aux victimes d’actes haineux et de discrimination.

Au cours des trois dernières années, le CRARR a répertorié des obstacles fort préoccupants au sein de la Commission dans le traitement des plaintes qu’il dépose pour des adultes et enfants victimes d’actes haineux, tels :

❏ des délais excessifs pour donner suite aux plaintes au stade de la recevabilité. Dans un cas, le CRARR a instamment demandé au président de la Commission d’accorder un traitement accéléré, exceptionnellement, à une plainte d’une famille arabo-musulmane avec des enfants de moins dix ans, à Saint-Eustache et ce, sans succès. La Commission a pris 10 mois pour une première réunion avec les victimes; entretemps, la famille a dû quitter le quartier pour vivre ailleurs;

❏ des enquêtes, même dans des cas avec des faits simples, qui prennent jusqu’à 5 ans. On doit attendre désormais un an pour avoir un enquêteur nommé au dossier;

❏ le fait de laisser les victimes d’actes haineux aller seuls, sans représentation d’avocat et à leur frais, devant le Tribunal des droits de la personne, quand la Commission ne considère pas l’affaire comme étant « d’intérêt public ». Tel est le cas d’un homme noir anglophone unilingue, âgé, handicapé, recevant de l’aide sociale et victime d’actes racistes violents, qui a dû abandonner sa cause par faute de moyens;

❏ la tendance de ne pas interviewer et entendre les enfants victimes ou témoins, malgré les obligations claires en vertu de la Convention internationale des droits de l’enfant.

Finalement, le CRARR note la mention inadéquate du racisme anti-noir dans le rapport alors que la communauté noire est particulièrement visée par les actes et les crimes haineux, une omission qui doit être corrigée dans les interventions à prendre en cette Décennie internationale des personnes de descendance africaine.

« Pour mieux lutter contre les actes haineux, la Commission doit mener des interventions et des enquêtes rapides et rechercher, devant le Tribunal des droits de la personne, des mesures de redressement lourdes de conséquences financières et sociales », déclare le Directeur général du CRARR, Fo Niemi.

Le CRARR représente actuellement devant la Commission, une dizaine d’enfants et de jeunes noirs et arabes victimes d’actes haineux et de discrimination (dont plusieurs en milieu scolaire). Dans plusieurs dossiers, l’enquête dure depuis plus de deux ans et on ne prévoit pas de conclusion avant 2021.