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PROFILAGE RACIAL : LA COMMISSION DES DROITS DE LA PERSONNE RÉCLAME DU SPVM 40 000 $ POUR UN HOMME D’ORIGINE SUD-ASIATIQUE



Montréal, 12 janvier 2017 — La Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ) a demandé à la Ville de Montréal et à deux policiers de payer 40 000 $ en dommages à un anglophone d’origine sud-asiatique pour profilage racial et autres violations de ses droits.

Le cas remonte à mai 2012, lorsque M. Julian Menezes, d’origine indienne et à l’époque chargé de cours à l’Université McGill, a été violemment arrêté par les policiers Stéfanie Trudeau (connue publiquement comme « Agente 728 ») et Constantinos Samaras, dans l’arrondissement du Plateau Mont-Royal. M. Menezes rentrait chez lui après une réception de marriage et était accompagné par deux amies de race blanche.

Quand M. Menezes et ses deux amies ont vu les deux policiers interpeller un cycliste qui paraissait visiblement contrarié, ils leur ont demandé ce qui se passait. Selon le cycliste, les policiers lui émettaient un billet de contravention car il n’avait pas de phare sur son vélo, alors que la raison réelle de leur interpellation était le fait qu’il portait un « carré rouge ».

La policière Trudeau est devenue agressive et a accusé M. Menezes d’être ivre. Elle l’a saisi et projeté sur le sol. Les deux policiers ont ensuite menotté M. Menezes, l’ont fait entrer avec force dans l’auto-patrouille, en tordant sa cheville dans le processus et ont ensuite quitté les lieux. Ils lui ont donné une « ballade sous les étoiles », le transportant jusqu’à un quartier loin du Plateau, qu’il ne connaissait pas, et l’ont finalement remis en liberté dans le secteur nord de la ville vers 3 h 30 du matin. M. Menezes n’avait aucun moyen pour rentrer chez lui avant de rencontrer quelqu’un qui lui montrait le chemin .

Durant le transport dans l’auto-patrouille, M. Menezes a été l’objet d’insultes racistes (la policière Trudeau l’a traité de « f-cking Indian » et lui a fait des menaces de violence sexuelle). Les deux policiers ont également accéléré et arrêté la voiture brusquement à plusieurs reprises, ce qui l’a propulsé vers la séparation en plexigas (il n’avait pas de ceinture de sécurité). En outre, il a reçu un billet de contravention de 146 $ pour avoir continué « un geste interdit » par un agent de l’ordre, que le billet n’a pas précisé.

M. Menezes a sollicité l’aide du CRARR pour déposer une plainte en déontologie policière et une autre, en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne.

Concernant la plainte en déontologie policière, le Commissaire a cité la policière Trudeau devant le Comité de déontologie policière pour violations de plusieurs dispositions du Code de déontologie, dont la détention et l’arrestation abusives, la force excessive, l’usage de propos racistes, le mauvais traitement, la pénalité injustifiée et la négligence concernant la santé et la sécurité de M. Menezes. Le Commissaire cite également le policier Samaras pour défaut de s’identifier lorsque demandé par M. Menezes et défaut d’intervenir pour arrêter les actes de la policière Trudeau. Le Comité de déontologie policière entendra la cause le 4 avril prochain.

Concernant la plainte pour atteinte aux droits de la personne, la CDPDJ a conclu, dans une décision transmise aux parties peu avant Noël, que M. Menezes a été l’objet de profilage racial et de traitement discriminatoire à cause de sa race. Elle réclame :

❐ que la Ville et les deux policiers mis en cause versent solidairement à M. Menezes, la somme de 25 000 $ pour dommages moraux,

❐ que la policière Trudeau et le policier Samaras versent 10 000 $ et 5 000 $ respectivement à M. Menezes, pour dommages punitifs et

❐ que le SPVM mette à jour son plan stratégique en matière de profilage racial et de profilage social dans un délai de 90 jours de la réception de sa décision. Le plan en question a pris fin en 2014 et il n’existe à l’heure actuelle aucune information concernant sa mise à jour.

« Bien sûr, cette décision est une grande victoire non seulement pour mes droits et ma dignité, mais aussi, pour tous les Montréalais qui ont été l’objet de pratiques policières discriminatoires en raison de leur race », a déclaré M. Menezes.

« Le cas se dirige devant le Comité de déontologie policière et fort probablement, devant le Tribunal des droits de la personne », selon Mr. Menezes. « J’ai hâte de participer à ces auditions et de voir les tribunaux rendre éventuellement des décisions en ma faveur, car malgré ce qui m’est arrivé, j’espère que nous vivons encore dans une société de droit où je peux compter sur la loi pour m’assurer une protection égale », conclut-il.

« Cette décision constitue une autre preuve de l’existence du profilage racial à Montréal, même si les décideurs publics et les tribunaux demeurent encore réticents pour reconnaître ce problème », note le directeur général du CRARR, Fo Niemi.

Les parties mises en cause ont jusqu’à demain pour se conformer à la décision de la CDPDJ, à défaut de quoi l’affaire sera portée devant le Tribunal des droits de la personne.