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LA COUR SUPRÊME ENTENDRA L’AFFAIRE BELA KOSOIAN QUI POURSUIT LA STM ET LA VILLE DE LAVAL POUR ABUS DE POUVOIR



Montréal, 15 avril 2019 — La Cour suprême entendra, demain le 16 avril, le cas de madame Bela Kosoian, arrêtée en 2009 par deux policiers de Laval pour ne pas avoir tenu la main courante de l'escalier mécanique à la station du métro Montmorency à Laval.

L’audition aura lieu à Ottawa, dès 9 h 30. Me Aymar Missakila, avocat de Mme Kosoian et associé au CRARR, présentera ses arguments. Il sera suivi par l’Association canadienne des libertés civiles, à titre d’intervenant, puis par la Société de Transport de Montréal et la Ville de Laval, à titre d’intimés.

La durée des présentations sera de 2 h 10.

Le 13 mai 2009, Mme Kosoian, originaire de la Georgie et, à l’époque, étudiante à l'UQAM, descendait l'escalier mécanique de la station de métro Montmorency à Laval lorsqu'un policier lui a enjoint de tenir la main courante conformément à un pictogramme apposé sur la partie fixe de l'escalier.

Considérant que le policier ne pouvait lui imposer une telle obligation, sachant qu'il n’existait aucun règlement à cet égard, Mme Kosoian a refusé d'obtempérer. Le policier Fabio Camacho, ayant décidé de lui donner un constat d'infraction, lui a demandé de lui fournir une pièce d'identité, ce qu'elle a refusé de faire, considérant qu’elle n’avait commis aucune infraction.

Le policier Camacho et un collègue l'ont alors conduite de force dans une salle de confinement de la station de métro où ils l'ont menottée et ont fouillé son sac à dos sans l’autorisation de Mme. Kosoian. Ils l’ont ensuite libérée après lui avoir remis deux constats d'infraction, l'un pour entrave au travail des policiers et l'autre pour ne pas avoir tenu la main courante de l'escalier mécanique.

Mme Kosoian a contesté ces constats d'infraction et, en mars 2012, la Cour municipale l’a acquittée, jugeant qu'elle avait le droit de refuser de s'identifier, puisqu'il n'y avait aucune obligation réglementaire lui imposant de tenir la main courante de l’escalier mobile.

Mme Kosoian a poursuivi le policier Camacho, la Ville de Laval et la STM, pour 24 000 $ en dommages moraux et punitifs et, additionnellement, la STM pour 45 000 $ en dommages moraux. En première instance, la Cour du Québec a donné raison aux parties défenderesses, concluant à l'absence de faute civile à l'endroit de Mme Kosoian. En 2015, elle s’est adressée à la Cour d’appel qui a confirmé le 5 décembre 2017 la décision de la Cour du Québec.

La décision de la Cour d'appel n'a toutefois pas été unanime, le juge Mark Schrager ayant été en désaccord avec ses deux autres collègues.

Dans sa dissidence exposée sur 21 des 32 pages de la décision, le juge Schrager exprime l’opinion que le pictogramme indiquant de tenir la main-courante n'a pas force de loi. Le non-respect du pictogramme ne peut donc constituer une infraction et par conséquent, l'intervention policière constituait un abus de pouvoir. En outre, l’arrestation qui a suivi était illégale puisque l'infraction qui aurait pu la justifier était simplement inexistante. Le juge Schrager conclut que l'un des policiers impliqués a commis une faute civile dont la Ville de Laval et la STM sont aussi responsables.

Les quatre questions juridiques sur lesquelles la Cour suprême devra maintenant se pencher sont:

1. Le pictogramme crée-t-il une obligation légale pour un citoyen de tenir la main courante de l’escalier mécanique du métro ?

2. En matière de responsabilité civile du policier, quelle est la norme applicable à un policier qui interpelle et arrête un citoyen sur la base d’une disposition légale qui n’existe pas ?

3. La STM, en tant que personne morale de droit public, encourt-elle une responsabilité civile du fait des agissements du policier ?

4. Si le policier a agi en se fondant sur une disposition réglementaire qui n’existe pas, peut-on dire qu’en refusant de s’identifier, Mme Kosoian a contribué à son propre préjudice ?