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UN EMPLOYEUR JUIF CONDAMNÉ À PAYER 12 500 $ À UN EMPLOYÉ JUIF POUR DISCRIMINATION RELIGIEUSE DANS L'EMPLOI



Montréal, 13 juillet 2017 — Le Tribunal des droits de la personne du Québec a rendu une décision en faveur d'un coiffeur juif, Richard Zilberg, qui a été interdit par son employeur, également de confession juive, de travailler les samedis et congédié ensuite pour avoir critiqué cette restriction.

Dans une décision bilingue de 16 pages datée du 27 juin dernier, le juge Yvan Nolet ordonne au Spa Orazen (actuellement, Spa Liv Zen) et à la propriétaire Iris Gressy, de payer conjointement à M. Zilberg six mois de salaireperdu (un équivalent de 6 006 $) et des dommages moraux de 4 000 $. Le Tribunal condamne également Mme Gressy à lui verser 2 500 $ en dommages punitifs pour les actes discriminatoires qu'elle a personnellement posés à son encontre.

En octobre 2011, les propriétaires du Spa Orazen ont embauché M. Zilberg, qui est de foi juive, à titre de coiffeur et coloriste. Il y travaillait en moyenne 30 heures par semaine, y compris les samedis.

En juillet 2012, les propriétaires, qui sont également juifs, ont informé M. Zilberg, qu'il ne pouvait plus travailler les samedis car il est juif et que les Juifs ne sont pas autorisés à travailler le jour du Shabbat. Cependant, bien qu'il s'identifie comme Juif sur le plan spirituel, il ne considère pas que le fait de travailler les samedis aille à l'encontre de sa croyance personnelle. Il considère donc inacceptable que ses employeurs lui imposent leur croyance.

Par ailleurs, M. Zilberg se demande pourquoi le salon est ouvert le samedi si l'on interdit aux Juifs de travailler le jour du Shabbat. On lui a répondu que le commerce peut être ouvert le samedi si les profits faits lors du Shabbat sont versés à des œuvres caritatives. Quand il demande pourquoi la politique a été modifiée, on lui demande juste de n'en parler à personne et de dire seulement que le samedi est pour lui un jour de congé. Il accepte à contrecœur cette directive afin de garder son emploi. La politique relative au travail du samedi touche aussi d'autres employés juifs sans pour autant être imposée aux employés non juifs.

Constatant la restriction illégale et inéquitable, M. Zilberg en parle à quelques clients juifs, dont certains ont fait part de leur désaccord avec les propriétaires. En août 2012, il est congédié pour en avoir parlé aux clients. Cette perte d'emploi lui a causé des difficultés financières pendant une longue période durant laquelle il a dû rebâtir sa clientèle et chercher un emploi. Il a également souffert au niveau de sa santé, de sa conscience et de son estime personnelle.

Le CRARR a déposé en son nom, une plainte pour discrimination fondée sur la religion, auprès de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (CDPDJ), en décembre 2012. En octobre 2015, la CDPDJ, après enquête, recommande à ses anciens employeurs qu'ils compensent M. Zilberg de 12 500 $ pour perte d'emploi et de 5 000 $ pour dommages moraux. Également, la CDPDJ réclame 2 500 $ en dommages punitifs à Mme Gressy, pour atteinte intentionnelle aux droits de M. Zilberg.

En raison de l'absence de réponse des deux parties mises en cause, la CDPDJ réfère alors le dossier au Tribunal des droits de la personne. Encore une fois, les deux parties mises en cause ne se sont pas présentées au procès et elles n'ont même pas déposé leur défense.

Dans sa décision, le juge Nolet souligne les droits fondamentaux communs aux Chartes des droits de la personne du Canada et du Québec. Plus précisément, il conclut que, dans l'affaire Zilberg, il y a eu une violation des droits à l'égalité à l'emploi, à la vie privée, à la liberté de conscience et de religion, et à la sauvegarde de sa dignité. En outre, en accordant des dommages-intérêts punitifs, le juge Nolet souligne qu' « il est important de dénoncer » les violations intentionnelles des droits de la personne « pour que les employeurs […..] respectent les dispositions » de la Charte québécoise.

« Je n'accepte aucune discrimination contre quiconque, car cela va à l'encontre de mes valeurs juives personnelles », a déclaré M. Zilberg. « S'exprimer contre les mauvais traitements infligés aux autres personnes est fondamental selon ma foi juive, et je fais ce que tout autre Juif devrait faire", a ajouté ce dernier.

« Le message du Tribunal des droits de la personne est clair : la décision de la part d'un employeur d'interdire ou d'obliger un employé à faire quelque chose en raison de la religion de ce dernier, viole les droits fondamentaux de l'employé, y compris le droit à l'égalité, à la dignité et à la vie privée, ainsi que la liberté de conscience et de religion de l'employé », a déclaré Fo Niemi, directeur général de CRARR.

La décision pourrait être uniquement une victoire morale pour M. Zilberg. Étant donné que ni Mme Gressy, ni l'entreprise, n'ont répondu aux avis légaux et n'ont assisté à l'audience, M. Zilberg devra s'efforcer de faire exécuter la décision à leur encontre en les trouvant et en essayant de saisir leurs biens s'ils ne paient pas les dommages-intérêts.