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LE 5e ANNIVERSAIRE DE LA MORT DE FREDY VILLANUEVA: DES RÉFORMES URGENTES À L’ORDRE DU JOUR



Montréal, 9 août 2013 --- Arrivant à l’ombre de la mort de Sammy Yatim, un jeune qui a été abattu par la police à Toronto le mois dernier, le 5e anniversaire du décès de Fredy Villanueva, survenu suite à une intervention policière le 9 août 2008 dans un parc à Montréal-Nord, constitue l’occasion de réclamer à nouveau des mesures concrètes pour mettre en place de meilleures pratiques policières et renforcer la protection des droits de la personne.

Des incidents récents justifient l’adoption des sept pistes de solutions suivantes :

1. Mettre fin au système de la police qui enquête sur la police, lorsque des blessures graves ou la mort surviennent à la suite d’une intervention policière. En dépit du projet de loi 12, présenté en automne dernier par le Gouvernement du Québec, il y a jusqu’à ce jour, peu d’actes concrets ni aucun échéancier pour la mise sur pied du Bureau des enquêtes indépendantes;

2. Réviser la formation et l’usage excessif ou mortel de la force, surtout quand des armes à feu et des tasers sont déployés trop rapidement par les corps policiers dans des incidents impliquant des jeunes, des hommes racisés et des personnes ayant des problèmes manifestes de santé mentale;

3. Adopter des politiques fermes contre le profilage racial : plusieurs services de police, notamment celui de Laval et de Longueuil, ne sont pas encore dotés de politiques et de mesures de formation et de dépistage sur cette pratique. Plusieurs services de sécurité publique, de transport en commun et de sécurité privée nient encore l’existence du profilage racial et résistent à des mesures telles la collecte de données sur les interpellations. Par ailleurs, une politique efficace contre le profilage racial doit s’accompagner d’une cessation de la lutte contre les “incivilités”, qui permet aux policiers de cibler les jeunes hommes racisés et les itinérants et de les pénaliser pour des délits mineurs;

4. Améliorer la protection des droits de la personne : depuis 2010, il y a trop peu de cas de profilage racial qui ont fait l’objet de décision devant le Tribunal des droits de la personne (deux à ce jour) et le Comité de déontologie policière (six cas, dont une seule décision positive). On peut identifier encore plusieurs obstacles à une protection effective, tels des délais excessifs (jusqu’à cinq ans pour terminer une enquête), des réclamations de dommages trop timides et l’échec de cerner le racisme systémique, au sein des enquêtes de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, ou encore, l’absence de politique sur le profilage racial, chez le Commissaire à la déontologie policière, ce qui mène souvent à un traitement inadéquat de la dimension raciale dans les plaintes.

Par ailleurs, on ne compte toujours pas, au sein du personnel enquêteur de ces deux organismes, des membres du groupe le plus ciblé par le profilage racial et dont les connaissances personnelles du problème apporteraient une valeur ajoutée à l’enquête : des hommes noirs;

5. Améliorer l’accès équitable aux tribunaux : À l’exception de quelques jugements (tel celui sur l’affaire Joel Debellefeuille), il y a eu plusieurs décisions problématiques en matière de profilage racial. Ce problème illustre, en partie, les difficultés reliées à une sous-représentation déplorable de la diversité raciale au sein de la magistrature québécoise ainsi que le manque de confort et de compétences de plusieurs juges face aux questions de racisme;

6. Réformer les règles d’admissibilité à l’aide juridique : selon la loi actuelle, des personnes accusées qui seraient normalement éligibles à l’aide juridique peuvent être refusées s’il y a peu ou pas de risque d’emprisonnement. Plusieurs accusés se voient ainsi dans l’obligation de se défendre sans avocat ou de plaider coupables. Cette politique est particulièrement préjudiciable pour les jeunes hommes noirs qui sont interpellés par la police de manière disproportionnellement plus élevée;

7. Élire des représentants dédiés à l’égalité et à la justice inclusive : malgré le discours des « valeurs fondamentales », plusieurs ministres de la Justice et de la Sécurité publique manifestent peu d’intérêt pour une protection effective des minorités contre la discrimination, une valeur pourtant fondamentale dans notre démocratie libérale. Également, peu d’élus municipaux offrent un programme concret de prévention du profilage et de la discrimination raciale dans divers secteurs de la vie urbaine.

Le CRARR fait appel aux membres des communautés les plus touchées par la discrimination et le profilage racial, ainsi qu’à leurs alliés, pour entreprendre des actions continues afin d’obtenir les réformes souhaitées, notamment en déposant des plaintes, en exigeant des changements aux pratiques institutionnelles courantes et surtout, en allant voter en grand nombre lors des prochaines élections municipales à Montréal.