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LES CAS DE DISCRIMINATION ET DE PROFILAGE RACIAL DANS LES SERVICES POLICIERS CONTINUENT À RENTRER


Montréal, 14 juin 2012 --- Malgré son annonce à tambour battant en février dernier de son plan d’action contre le profilage racial, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) continue à être la cible de nombreuses plaintes de discrimination et de profilage racial, provenant des personnes racialisées de tous les âges qui dénoncent de sérieuses violations de leurs droits civils et constitutionnels à la suite d’une interception ou intervention.

Ces plaintes et leur nature impliquant souvent la force excessive non-justifiée entraînent une remise en question de l'efficacité de mesures institutionnelles de prévention du profilage racial et inévitablement, l'efficacité des moyens de protection des victimes de cette pratique ainsi que les sanctions à imposer aux autorités de sécurité publique et privée.

Au début de mai 2012, un homme noir anglophone vers la trentaine, a été ciblé et abordé dans un club au centre-ville de Montréal par un agent du groupe Éclipse (l’escouade antigang) du SPVM, qui lui demande de présenter une pièce d’identité. L’agent a consigné ses renseignements personnels sans lui expliquer la raison de l’interpellation, tandis que d’autres personnes non noires n’étaient pas traitées de la même façon.

Également en mai 2012, un jeune homme d’origine haïtienne qui sortait d’un club avec ses deux amis noirs, a été interpelé tard dans la nuit sur le secteur nord par des policiers du groupe Éclipse. Même s’il était assis en arrière à titre de passager, il a été obligé de s’identifier et de sortir de sa voiture. Devant ses amis en état de choc, il fut ensuite violemment malmené par une policière de race blanche, qui a presque arraché ses cheveux et a violemment frappé son visage contre le sol, malgré le fait qu’il n’offrait aucun signe de résistance. Arrêté et menotté sans connaître le motif, il fut ensuite accusé d’entrave au travail policier. Il a dû se rendre à l’hôpital pour ses blessures.

En février 2012, B.M. conduisait la voiture beige dorée de son épouse pour se rendre à l’Hôpital Santa-Cabrini dans l’Est de Montréal afin de traiter un mal de tête sévère. Sur le chemin, il s’est fait couper la route par une voiture de police. Deux agents sortent de leur véhicule et brandissent leurs armes sur lui. On lui dit de rester immobile. À l’arrivée d’autres voitures de police sur le lieu, on lui ordonne de sortir de sa voiture. Un agent brise la fenêtre du côté passager de sa voiture. Il fut ensuite arrêté, menotté et détenu dans une voiture de police sans être informé des raisons de son arrestation ou de ses droits. Pendant 15 minutes, il fut interrogé par les policiers qui ont alors reconnu l’erreur de leur interpellation : ils l’avaient pris pour le voleur. Après sa libération, il est allé à l’Hôpital. Par la suite, il a contacté sa compagnie d’assurance pour demander l’indemnisation des dommages causés à la voiture de son épouse lors de l’incident. Toutefois, la couverture a été refusée à cause du rapport policier; ce qui a choqué B.M. est le fait que les policiers avaient décrit sa voiture comme étant grise, la couleur de la voiture volée.

En novembre 2011, C.L., un homme d’ascendance indienne dans la quarantaine, a été abordé de façon arbitraire par deux policières, vers 21 h 20, à l’intérieur de la station de métro Guy. Les deux agentes l’ont ensuite interrogé sans avoir aucune raison valable outre le fait qu’elles l’avaient repéré dans d’autres stations de métro antérieurement. C.L. s’est senti intimidé et humilié, étant donné que l’intervention policière s’est déroulée dans un espace public où il aurait pu rencontrer des amis ou des associés. En ce qui concerne sa détention, C.L. est persuadé qu’il s’agit d’un acte basé sur des préjugés raciaux. Pour cette raison, il a mandaté le CRARR pour déposer des plaintes en son nom pour protéger ses droits constitutionnels.

Des cas similaires d’interventions policières injustifiées qui enfreignent des articles de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et le Code de déontologie des policiers ont été signalés non seulement à Montréal, mais aussi dans les villes environnantes. Tous ces cas ont en commun des arrestations ou des détentions de citoyens racialisés fondées, du moins en partie, sur des préjugés raciaux.

De plus, comme dans le cas de Joel Debellefeuille (l’homme d’affaires noir de Brossard qui a été suivi et interpellé dans sa BMW en 2009 à cause de son nom français et qui, encore une fois, a été interpellé en mars 2012 par deux policiers de Longueuil après avoir été suivi au long de onze pâtés de maisons lorsqu’il conduisait son fils à la garderie), les victimes ont été également soumises à des traitements inappropriés et discriminatoires, parfois de manière explicite et souvent, avec de la force excessive.

À titre d’exemple, en avril 2012, un jeune de race noire s’est fait interpeler par la police dans une municipalité situant au nord de Montréal, lorsqu’il quitta une fête privée tard dans la nuit. Malgré la présence de jeunes de diverses origines, le jeune et ses autres amis noirs étaient les seuls qui ont été interceptés par des policiers qui leur obligeaient à ramasser les déchets devant la maison de leur ami, où se tenait la fête. Lorsque le jeune demande pourquoi eux et non pas les autres, étant donné qu’ils n’étaient pas responsables de ces déchets, il fut violemment retiré de sa voiture, détenu et menotté, et ce, devant ses amis. Sa chemise déchirée, il s’est fait interroger par un policier sur le tatouage sur son corps. Depuis l’incident, sa famille et lui vivent dans la détresse en attendant l’annonce de l’accusation criminelle que les policiers ont promis de porter contre lui.

En novembre 2011, K.M., une femme noire dans la quarantaine, accompagnée de son fils, a été suivie pendant longtemps et ensuite arrêtée par une voiture de police lorsqu’elle conduisait sa BMW à Brossard. L’un des policiers lui a demandé des pièces d’identité et, constatant qu’elle parlait seulement anglais, il lui a alors rappelé, à quatre reprises et dans un ton impoli, qu’elle vivait au Québec et devrait ainsi parler français. Étant donné qu’elle ne s’est fait interpeler qu’après avoir établi un contact visuel avec les policiers, madame K.M. soupçonne avoir été victime de profilage racial, notamment après avoir entendu le policier dire à son partenaire que la voiture lui appartient.

Toutes ces personnes ont confié un mandat au CRARR pour déposer des plaintes de discrimination et de profilage racial. Ces cas ne représentent cependant qu’une fraction des dossiers de profilage racial ouverts par le CRARR au cours des cinq derniers mois.