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LE COMITÉ DE DÉONTOLOGIE POLICIÈRE RENFORCE LA PLAINTE CONTRE LES POLICIERS MAIS NÉGLIGE LE PROFILAGE RACIAL


Montréal, le 29 août 2011 --- En février 2010, Amal Asmar, une étudiante d'origine arabe de l'Université Concordia se fait arrêter violemment par deux policiers de Montréal qui lui donnent, à  cette occasion, deux amendes excessives. Soutenue par le CRARR, cette étudiante vient de gagner une autre ronde dans son dossier auprès du Comité de déontologie policière.

Lors de l'incident en question, madame Asmar a été violemment détenue et menottée par deux policiers après son départ de la bibliothèque de l'université au centre-ville tard, au cours de la nuit.

L'affaire débute précisément alors que cette étudiante est assise sur un banc près de l'arrêt d'autobus pour vérifier son sac. Une voiture de police s'approche et deux policiers commencent à  la questionner agressivement. C'est à  ce moment-là  que les agents demandent à  madame Asmar de présenter des pièces d'identité. Les policiers répondaient à un appel du 9-1-1 d'une « francophone » qui avait appelé pour signaler qu'une autre femme se faisait battre par un Noir. Les policiers interceptent donc madame Asmar, qui se trouve près des lieux où l'appel au 9-1-1 est effectué, mais ne lui transmettent pas cette information sur le coup.

Dans les minutes qui suivirent son interception, madame Asmar est violemment arrêtée. Elle est ensuite libérée avec deux amendes : une de 620 $ pour mauvaise utilisation de propriété municipale et une de 420 $ pour avoir émis un bruit fort autre qu'un cri. Les policiers notent dans leur rapport que l'étudiante a déposé cinq sacs sur le banc et qu'elle a crié fort. Madame Asmar soutient cependant qu'elle n'avait que deux sacs et qu'elle a crié quand les policiers l'ont malmenée parce qu'elle avait peur et mal.

À l'aide du CRARR, madame Asmar a déposé une plainte de violation des droits de la personne contre les policiers et la Ville de Montréal, de même qu'une plainte en déontologie policière contre les policiers pour profilage racial et autres violations de ses droits. En raison du tollé public sur le montant excessif des amendes et l'arrestation abusive, la Ville a supprimé les amendes contre elle.

En janvier 2011, le Commissaire à  la déontologie policière Paul Simard a maintenu la majeure partie de la plainte déposée par madame Asmar et a cité les deux policiers devant le Comité de déontologie policière pour avoir violé plusieurs articles du Code de déontologie des policiers. Ce dernier rend une décision en rejetant les aspects de la plainte relatifs aux accusations sans justification et au refus de s'identifier.

Le Commissaire évacue également les aspects liés au profilage racial et rejette la plainte contre le superviseur policier, qui s'est présenté pendant l'arrestation, étant donné qu'à  son avis, le superviseur ne pouvait être « tenu responsable pour l'information fausse ou erronée qu'il a reçue » des policiers.

Troublée par la prise de la décision du Commissaire sur la justification des deux amendes et le rejet de l'aspect de profilage racial, madame Asmar dépose une demande de révision auprès du Comité de déontologie policière en février 2011.

La semaine dernière, le Comité, par le biais de la juge Louise Rivard, rend la décision dans laquelle elle remet en question la décision des policiers d'émettre des amendes de même que le montant exigé de madame Asmar. La juge énonce que les amendes « disproportionnées » représentent le double et le triple du montant minimal normalement associé aux infractions. Le Comité prend note des « mauvaises intentions » des policiers et remet en question leur « attitude », et ce, notamment en raison du fait qu'une des amendes a été émise pour avoir crié. Le Comité renverse ainsi la décision du Commissaire Simard de justifier les amendes et exige la citation des deux policiers devant le Comité.

Le Comité conclut toutefois que les policiers n'ont rien fait de « répréhensible » en s'attardant sur madame Asmar qui était assise sur un banc public à  2 h 30 pendant l'hiver. Il ajoute également que les agents n'ont pas agi en fonction de sa race, rejetant par la même occasion l'accusation de profilage racial.

Selon Mme Asmar, « Les policiers répondaient à  l'appel d'une francophone portant sur l'agression d'une autre femme par un Noir. Si tel est le cas, pourquoi ont-ils fait preuve de tant de force excessive et de mauvaise foi, de même que l'imposition d'amendes disproportionnées pour quelqu'un qui aurait pu être une victime ou un témoin ? »

« Aussi, pourquoi m'auraient-ils abordée en anglais si la femme qui a appelé le 9-1-1 était francophone ? Connaissent-ils la couleur de la femme qui a appelé? Était-elle blanche ? Si oui, pourquoi ai-je été arrêtée ? », se demanda-t-elle.

Fo Niemi, le directeur général du CRARR, a ajouté : « Tandis que le Comité a bien réagi quant aux deux amendes excessives, il a complètement raté son coup quant à la dénonciation du profilage racial. Nous croyons que le Commissaire et le Comité ont démontré un incroyable manque de compréhension du profilage racial, surtout en ce qui concerne la jurisprudence actuelle de notre pays en la matière. »

Actuellement, le CRARR examine les options juridiques pour porter la décision en appel.

Lire la décision :

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